Florent Manaudou : «J’ai prouvé que j’avais des nerfs solides»

Fini le «tout doux» Manaudou, son surnom lors de son entrée au Cercle des nageurs de Marseille en 2011 et qui reste son pseudo Facebook. Place au Hulk de Kazan, et en mode vert, s’il vous plaît. La parole pour commencer à Nathan Adrian, son dauphin, cou de taureau, des dents qui brillent par centaine quand il sourit façon US, et la résignation désormais inscrite dans les tripes: «Pfff, que dire ? C’est un phénomène, et je pense qu’il peut aller encore bien plus vite.»

Ne minimisons pas le rôle du golden boy Adrian, il a déclenché la colère de Manaudou en claquant vendredi le meilleur temps des demies. Son pote phocéen Mehdy Metella, 5e de la finale du 100 m papillon, raconte la veille de course, au coin du feu de l’hôtel Relita : «Florent avait le deuxième temps, c’est quelqu’un de persévérant, il n’aime pas perdre. Je lui ai demandé s’il était énervé. Il m’a dit : « Oui »

La clé d’un succès est parfois aussi simple qu’un dialogue entre Manaudou et Metella. Romain Barnier, le coach, enchaîne : «Je l’ai rarement vu aussi nerveux que ça. Toute la décontraction accumulée en début de semaine a cédé la place à de l’anxiété, en deux jours il a pris quelques rides. Il a passé une mauvaise nuit. J’ai bien apprécié le coup de pied aux fesses donné par Nathan Adrian hier, il avait besoin de ça pour faire une belle performance. Ce temps d’Adrian (21’’37), il l’a déjà fait, il était surtout très insatisfait de ses propres défauts. Cela n’a pas été des Mondiaux faciles, il a mérité ses titres, cela a encore plus de saveur.»

«Le sentiment du devoir accompli»

Le petit frère de Laure, déjà un peu perturbé par le départ mercredi de son rival César Cielo (champion du monde du 50 m en 2009, 2011 et 2013), le reconnaît : «Ça m’avait un peu énervé de voir Nathan (Adrian) nager 51’’3 hier, je n’étais pas très serein avant cette finale. Je me suis posé beaucoup de questions, à me demander pourquoi je n’avais pas réussi un bon start en demie, pourquoi je ne suis pas devant aux 15 m comme d’habitude. J’ai rectifié le tir. Avec le meilleur temps de toute l’histoire en textile, j’ai prouvé que j’avais les nerfs solides.»

Redevenu un Bruce Banner paisible dans la touffeur de la zone mixte, il poursuit : «J’ai le sentiment du devoir accompli. J’étais venu pour gagner ce 50, et uniquement ce 50. J’ai eu la bonne surprise d’être en forme pour remporter le 4×100 m avec les copains, et le 50 m papillon. Je pourrais nager encore plus vite. Mon temps, c’est le mieux que je pouvais faire aujourd’hui, il me manquait un peu de jambes, mais c’est de bon augure pour l’an prochain. Je sais que je ne fais pas une course parfaite. C’est possible de nager sous les 21 secondes, mais dans une grande finale, ça me paraît compliqué.»

Il envoie bouler le tsar Alexandre Popov, qui nous disait perfidement, jeudi, à propos de son premier titre mondial en individuel : «Ce n’est pas une discipline olympique, le 50 m papillon, si ?» Il efface la déception de Barcelone, en 2013, «cette 5place sur une distance où je suis champion olympique. Certes il y avait les histoires de courant [à cause de turbines, certains nageurs dans les couloirs extérieurs ont été favorisés, ndlr], mais je fais une finale nulle. Cela fait une médaille de plus dans la collection, il y en a une qui est au coffre, l’or olympique. Je ne les regarde pas trop, je veux en gagner encore d’autres.»

Il arrêtera sans doute après Rio, s’il remporte un second titre aux Jeux. Mais, qui sait ? Il trouvera peut-être d’autres barrières à éclater. Coach Barnier le voit bien déposséder le Brésilien Cielo de son record du monde (20’’91) mâtiné de polyuréthane : «Il y avait trop de décontraction lors des séries du 50 m, aujourd’hui, il était trop tendu. J’imagine que lorsqu’il trouvera le juste milieu, il fera encore un meilleur temps. L’année prochaine, ça repart de zéro. Il y a un niveau de talent, un niveau de maîtrise, et une envie particulière. Maintenant, s’il continue d’y mettre autant de désir et de travail, voire plus, il sera dur à battre à Rio. Il a la planète aux fesses.» C’est le cas de le dire. Dans l’eau, l’adversité connaît bien les pieds de Manaudou, mais beaucoup moins son visage.  

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