Avec les supporteurs du Red Star, club contraint à l’exil

Défait 5-1 à «domicile» contre Valenciennes vendredi, le Red Star FC pointe à l’avant-dernière place de L2. En plus de rencontrer des difficultés sur le terrain, le club audonien peine à rassembler ses supporteurs. Ile présente l’influence la plus faible de la deuxième division. Triste constat pour un club qui en National rassemblait près de 2000 personnes par match (3500 en fin de saison) et, qui fort de son siècle d’histoire a toujours su maintenir un lien très fort avec ses supporteurs.

En fin de saison dernière, l’euphorie de la remontée du club centenaire avait très rapidement laissé sa place aux interrogations sur sa domiciliation. Le mythique stade Bauer, antre des verts et blancs depuis 1909, ne répondant pas aux normes imposées pour la Ligue de foot professionnelr. Le club a dû déménager dans l’Oise au stade Pierre-Brisson à Beauvais, à près de 80 km de Saint-Ouen. Les supporteurs du Red Star, club populaire s’il en est, s’enorgueillissent de soutenir bien plus qu’une simple équipe, mais une certaine idée du football. Implanté au cœur de Saint Ouen, le Red Star brandit fièrement son attachement à la Seine Saint-Denis. Ici, on aime se rappeler que le stade Bauer fut une ancienne cache d’armes sous l’Occupation. Les slogans lancés dans les travées ne trouvent écho dans aucun autre stade de France. Pour beaucoup délocaliser le club, revient à lui faire perdre son âme.

Ce vendredi, c’est donc Red Star-Valenciennes. Les abonnés ont rendez-vous à 17 h 30 au stade Bauer pour prendre la navette affrétée par le club. « La montée en Ligue 2 ça fait 15 ans qu’on attend ça ! Alors, jouer à Beauvais c’est nul, mais on y va quand même. Si les matches avaient lieu ici, on serait plus de 3000 à chaque fois », imagine Jean-Pierre. Dans le stade la réserve s’échauffe. Sébastien Robert entraineur de l’équipe 1 l’an passé les supervise. Un brin désabusé par la situation il explique : « Un club c‘est les spectateurs. La situation est difficile, mais on ne pouvait plus jouer ici. C’est triste d’en arriver là. Maintenant les joueurs sont des professionnels, ils passeront outre. L’esprit du Red Star il existe surtout pour les supporteurs. »

Le coup d’envoi est donné à 20 h. Le dernier TER pour revenir gare du Nord part à 20 h 10 de Beauvais. Autrement dit, pour tous ceux qui n’ont pas de voiture le car est la seule solution, mais il faut envoyer un mail 48 h avant pour réserver sa place. François, supporteur du Red Star depuis toujours est abonné au club. Il a quitté plus tôt le travail. Mais pas de chance, il ne s’est pas inscrit. « Il n’y avait rien écrit sur le site», peste-t-il. C’est un peu la cacophonie ici, sur la trentaine de personnes présente, seule une petite quinzaine peut monter dans la navette. «On doit prendre les ramasseurs de balles au retour il n’y aura plus de place», explique le responsable. François essaye de négocier, mais rien n’y fait. Il a payé son abonnement mais il n’a pas envoyé de mail. Il ne montera pas. Il repart chez lui en colère.

Ruines

En face, à l’Olympic, QG des supporteurs, on assiste à la scène mi amusé mi dégouté. Eux ne vont pas à Beauvais. « Le Red Star c’est à Bauer », expliquent-ils. Il est 18h30 ils sont venus voir le Multi Ligue 2 retransmis sur BeIn Sports. Akli le patron raconte: « J’ai pris la télé après la fermeture du stade. Ce sont eux qui me l’ont demandé, pour continuer à voir le Red Star. » Dans ce bar sans âge, où seule la nouvelle télé nous indique à quelle époque nous sommes, c’est une ambiance que l’on vient chercher. Un petit bout de Bauer. Un parfum du passé, avec toutes les photos jaunies du club collées au mur. Comme si supporter le Red Star avait quelque chose d’anachronique, célébrer le football ouvrier à l’heure du foot business. Pourtant, les présents se défendent d’être des nostalgiques. « On ne regrette pas le passé, on est pour la rénovation du Stade, on ne veut pas le laisser en état, il tombe en ruines. »

A 20 heures une quarantaine de fans est regroupée. Une enveloppe passe, on récupère les cotisations pour le car qui ira au Havre lors de la sixième journée. Pas question d’abandonner l’équipe. Vincent responsable de l’association Red Star Bauer s’explique. «Le président Addad nous reproche de ne pas aller au stade. Mais on lui a dit  que ce n’est pas un boycott. On ne peut juste pas. Quitte à poser une demi-journée, autant le faire pour les déplacements. C’est d’autant plus frustrant que Bauer peut accueillir jusque 3000 personnes… et on va jouer à 80 bornes pour 1000 supporteurs. Cette montée est un énorme gâchis.» Il reproche au club et la mairie de ne pas avoir suffisamment anticipé le dossier. «Nous, ça fait plus de quatre qu’on en parle, qu’on sensibilise… et rien n’a été fait. On a eu une réunion en juillet. Maintenant on nous parle de petites rénovations. Mais rien de précis. On ne sait pas où on va, de toute façon il va falloir trouver une solution car on ne pourra pas toujours jouer à Beauvais.»

Quand la tribune très clairsemée de Beauvais apparaît à l’écran, tout le monde soupire. Il y a 1500 personnes ce soir, dont 300 Valenciennois. « Il ya très peu de vrais supporteurs, beaucoup de Beauvaisiens. Cet hiver ce sera encore pire ! », balance quelqu’un. Après le cinquième but des visiteurs, tout le monde partage la même analyse : « A Bauer ce ne serait pas arrivé. Une équipe qui joue toute l’année à l’extérieur elle ne peut pas se porter bien. »

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