« Les Oiseaux » : Hitchcock à tire-d’aile

Je me souviens qu’en août 1963 la bande-annonce des « Oiseaux » était géniale : Hitchcock lui-même présentait le film, en précisant bien qu’il fallait se méfier des bêtes à plumes, puis il taquinait un serin en cage (qui lui piquait le doigt d’un coup de bec) et se mettait à table pour manger un poulet.

Il ne le savait pas, mais c’était son dernier film réussi : les cinq films suivants ont terriblement vieilli. Pas « les Oiseaux », curieuse fiction de suspense fantastique, où des milliers de mouettes attaquent les humains.

A l’époque, « Hitch » racontait aux journalistes que c’était un événement authentique, que les habitants d’un patelin américain avaient été soumis aux plongées kamikazes de volatiles dangereux. Certains critiques y virent une méditation métaphysique sur la fin des temps, sur la menace atomique, sur la vengeance de Dieu. Chacun ses âneries, n’est-ce pas ? En tout cas, c’est magistral.

Cruel, voire sadique, toujours tyrannique

En fait, le réalisateur s’est inspiré d’un roman de Daphné du Maurier (auteur de deux autres romans adaptés par « Big Alfred », « la Taverne de la Jamaïque » et « Rebecca ») et a fait écrire le scénario par Evan Hunter (pseudonyme d’Ed McBain, génie du polar). Celui-ci a travaillé dur sur ce script et a raconté son expérience dans un (passionnant) livre, « Hitch et moi » (Ramsay). Les effets spéciaux (très sophistiqués à l’ère préinformatique, autant dire le paléolithique supérieur) sont signés Ub Iwerks, créateur du personnage de Mickey Mouse chez Walt Disney.

Quant à Tippi Hedren, dont c’était le premier rôle (elle avait 33 ans), elle a alors découvert la face cachée de Hitchcock : cruel, voire sadique, toujours tyrannique. Elle fut même un brin stupéfaite quand le bonhomme lui proposa de partager quelques instants de fun ensemble. L’idée de faire la pirogue congolaise avec le Bibendum lui répugnait. Elle le traita même de « fat boy ». C’était le péché maximum. Personne n’avait osé. Du coup, le tournage se transforma en enfer pour elle, et, lors du film suivant, « Pas de printemps pour Marnie », ce fut pire. Après quelques autres tentatives cinématographiques, Tippi Hedren préféra se consacrer à l’élevage des félins.

Pour le pittoresque : notez l’apparition du cinéaste, au début du film, en compagnie de deux chiens. Lesquels, sur le plateau, étaient, de l’avis général, les êtres les mieux traités par le maître du suspense.

François Forestier

♦ Les Oiseaux, par Alfred Hitchcock. Film américain, avec Tippi Hedren, Rod Taylor, Jessica Tandy, Suzanne Pleshette (1963, 2h).

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