Brésil: les ennemis de Rousseff, un moindre mal pour les pro-destitution

Renan Calheiros et Michel Temer le 2 mars 2016 à Brasilia
Renan Calheiros et Michel Temer le 2 mars 2016 à Brasilia

Les Brésiliens qui réclament la destitution de la présidente de gauche Dilma Rousseff voient ses ennemis politiques, pourtant éclaboussés par des affaires de corruption, comme un moindre mal, à l’instar d’Eduardo Cunha, qualifié de « méchant préféré » en référence au film « Les Minions ».

Dans la rue, aucun des dirigeants qui ont juré la perte de « Dilma » ne soulève un réel enthousiasme.

Du vice-président Michel Temer au président de la chambre des députés Eduardo Cunha en passant par le président du Sénat Renan Calheiros, respectivement premier, deuxième et troisième dans l’ordre de succession présidentiel, tous font partie, selon eux, d’une génération d’hommes politiques corrompus qui doit être expurgée.

Le président du Sénat Renan Calheiros, le 19 avril 2016 à Brasilia © EVARISTO SA AFPLe président du Sénat Renan Calheiros, le 19 avril 2016 à Brasilia © EVARISTO SA AFP
Le président du Sénat Renan Calheiros, le 19 avril 2016 à Brasilia © EVARISTO SA AFP

Plus de 58% des 513 députés font l’objet d’une enquête ou ont été accusés de corruption, voire de meurtre ou de viol, selon Transparence Brésil. Et 60% des sénateurs ont des démêlés avec la justice, d’après cette ONG.

Néanmoins, parmi les partisans de « l’impeachment » ou destitution, réunis dans un camping à Brasilia, ce casting politique est un moindre mal, comparé à l’impopulaire présidente de gauche, son prédécesseur Luiz Inacio Lula da Silva (2003-2010) et le Parti des Travailleurs (PT), également synonyme de corruption pour eux.

Temer, Cunha ou Calheiros, « ce n’est pas la meilleure option. Mais aujourd’hui, n’importe quoi est mieux que le PT », affirme Lidice Teixeira do Nascimento, 43 ans, propriétaire d’une boutique de vêtements à Sao Paulo.

– ‘Voleur de poules’ –

Le président de la Chambre basse Eduardo Cunha lors du vote des députés le 17 avril 2016 à Brasilia © EVARISTO SA AFPLe président de la Chambre basse Eduardo Cunha lors du vote des députés le 17 avril 2016 à Brasilia © EVARISTO SA AFP
Le président de la Chambre basse Eduardo Cunha lors du vote des députés le 17 avril 2016 à Brasilia © EVARISTO SA AFP

Elle fait partie de ceux qui ont campé le week-end dernier sur l’Esplanade des ministères, célèbre pour les bâtiments d’Oscar Niemeyer. Avec plus de 50.000 personnes, elle a suivi le vote des députés ouvrant la voie à la destitution sur des écrans géants.

Mme Teixeira sait bien que Eduardo Cunha est l’un des nombreux hommes politiques impliqués dans le vaste scandale de corruption Petrobras, du nom de la compagnie publique pétrolière.

Mais comme beaucoup au Brésil, elle l’appelle « mon méchant préféré », à l’instar du film d’animation « Les Minions », où ces créatures jaunes n’ont qu’un seul but: servir un maître le plus méchant possible. « Il a donné le coup d’envoi à l’impeachment », explique cette femme à propos du président de l’Assemblée.

Michel Temer le 11 avril 2016 à Brasilia © ANDRESSA ANHOLETE AFP/ArchivesMichel Temer le 11 avril 2016 à Brasilia © ANDRESSA ANHOLETE AFP/Archives
Michel Temer le 11 avril 2016 à Brasilia © ANDRESSA ANHOLETE AFP/Archives

Basilio, technicienne en salle d’opération de 51 ans, donne le même surnom à M. Cunha, car comparé aux délits d’autres élus, il passe pour un « voleur de poules ».

Selon un récent sondage du quotidien Folha de Sao Paulo, parmi ceux qui souhaitaient le départ de Mme Rousseff, la très grande majorité (87%) veut également que M. Cunha abandonne son poste.

Quant au vice-président Temer, 54% des Brésiliens réclament sa destitution, car ils estiment qu’à son poste il ne pouvait pas ignorer le maquillage des comptes publics reproché à Dilma Rousseff.

– ‘La pire chose, c’est le PT’ –

Bien qu’elle ne soit pas accusée de corruption, les manifestations contre Dilma Rousseff mêlent le scandale de corruption Petrobras, les soupçons contre Lula et la forte récession économique.

Climat d'affrontement le 17 avril 2016 à la chambre basse du congrès à Brasilia © EVARISTO SA AFPClimat d'affrontement le 17 avril 2016 à la chambre basse du congrès à Brasilia © EVARISTO SA AFP
Climat d’affrontement le 17 avril 2016 à la chambre basse du congrès à Brasilia © EVARISTO SA AFP

Peu des détracteurs de la chef de l’Etat mentionnent les manoeuvres fiscales dont on l’accuse et qui n’ont rien à voir avec la corruption, alors que le président du Sénat M. Calheiros a été mis en cause dans l’enquête sur Petrobras pour avoir reçu des pots-de-vins présumés.

« Calheiros est l’un des pires voyous qu’est produit la politique brésilienne », affirme Celso Anaruma, un routier de 56 ans de l’Etat de Sao Paulo en démontant sa tente. « Cunha n’est pas un saint. Mais il y a pire », ajoute-t-il. Quoi donc? « La pire chose, c’est le PT. Même un imbécile vaut mieux que Dilma. »

Nombreux sont les Brésiliens qui rappellent que le nom de M. Temer est apparu dans une affaire liée au dossier Petrobras. Mais pour l’heure, il n’a pas été inquiété.

« Il me semble qu’il est un peu mieux qu’elle (Rousseff) », estime Charlo Ferreson, une coiffeuse de 43 ans, sans pourvoir expliquer pourquoi.

Selon elle, il faudrait de nouvelles élections présidentielles. « Le problème, c’est qu’il n’y a pas de bon candidat. »

21/04/2016 09:01:35 – Brasilia (AFP) – © 2016 AFP

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