Cannes : Woody Allen n’est pas vexé, Laurent Lafitte justifie sa blague

Les observateurs de la Croisette y ont vu la première polémique de ce Cannes 2016, mais pour les intéressés, «c’est une tempête dans un verre d’eau», dixit Laurent Lafitte. Le comédien et Woody Allen ont commenté séparément la controverse engendrée par le Français, maître de la cérémonie d’ouverture du Festival, qui a lancé mercredi à l’adresse du cinéaste américain: «Ça fait plaisir que vous soyez en France parce que ces dernières années vous avez beaucoup tourné en Europe, alors que vous n’êtes même pas condamné pour viol aux États-Unis.»

Des paroles bien plus proches de la réalité que ne le soupçonnait Laurent Lafitte. Quelques heures auparavant, le fils de Woody Allen et de Mia Farrow, Ronan Farrow, rappelait dans une tribune incendiaire que depuis 20 ans sa sœur accuse leur père d’avoir abusé d’elle.

Lorsque Laurent Lafitte a adressé son trait d’esprit, des murmures de choc ont retenti dans la grande salle du Palais des festivals. Une inquiétude partagée par les organisateurs de la manifestation. Dès la fin de la cérémonie, le délégué général Thierry Frémaux est allé voir Woody Allen pour être sûr que le réalisateur qui débutait le Festival n’avait pas été vexé. D’après Variety, le cinéaste de 80 ans l’a rassuré, sans ambiguïté, confiant apprécier l’humour sous toutes ses formes, même «provocateur».

Même son de cloche le lendemain à un déjeuner organisé en l’honneur de Café society par Variety. Woody Allen a redit être «totalement favorable à ce que les comédiens fassent les plaisanteries qu’ils ont envie de faire». Rappelant aux journalistes de la publication hollywoodienne qu’il était lui-même «un comique». Avant d’ajouter qu’«il en fallait beaucoup pour qu’il se sente offensé».

Interrogé sur les allégations de Dylan Farrow, sa fille adoptive qui l’accuse d’agressions sexuelles lorsqu’elle était enfant, Woody Allen a déclaré qu’il avait «déjà tout dit» sur ce sujet. Vieille de vingt ans, l’affaire a éclaté quand le cinéaste a quitté sa compagne d’alors, Mia Farrow, pour la fille adoptive de celle-ci Soon-Yi Previn, âgée de 21 ans à l’époque. La séparation, qui avait beaucoup scandalisé en soi, s’est envenimée quand Dylan Farrow, qu’Allen et Farrow avaient adopté ensemble, confie à un juge que «son père Woody Allen lui a fait des choses qu’elle n’aimait pas».

Le cinéaste avait nié tout geste inapproprié et y voyait la main de Mia Farrow qui cherchait à dresser ses enfants contre lui. Une enquête des services sociaux de New York avait conclu, au moment d’une bataille judiciaire pour la garde de ces derniers, que les accusations d’agression sexuelle étaient «non concluantes». Mais Dylan Farrow avait réitéré ses accusations, publiquement, en 2014. Le réalisateur américain les avait immédiatement qualifiées de «fausses et honteuses».

Laurent Lafitte: «Si j’avais su, j’aurais retiré ma blague»

La tribune de Ronan Farrow du 11 mai qui reproche à la presse et Hollywood de fermer les yeux sur cette affaire, a été publiée dans le Hollywood reporter. Mesure de rétorsion oblige, le fils du réalisateur s’est vu refuser l’accès au déjeuner Café Society. Mais le journal spécialisé a pu s’entretenir avec Laurent Lafitte et voir comment le comédien vivait la controverse sur sa blague qui a aussi irrité les proches de Roman Polanski qui se sont également sentis visés. «Je ne voulais blesser personne», jure-t-il. «Lorsque je suis monté sur scène, j’ignorais que Ronan Farrow avait écrit cette lettre ouverte et évoquait des soupçons de viol. Si j’avais su, j’aurais retiré ce trait d’esprit», révèle-t-il.

Et de renchérir: «Lorsque j’ai écrit cette blague il y a trois semaines, je visais le puritanisme américain. Je m’étonnais qu’un grand réalisateur américain comme Woody Allen tourne autant en Europe alors qu’il [n’avait pas été poursuivi pour viol aux États-Unis] comme Roman Polanski. J’ignorais tout de l’affaire».

Laurent Lafitte précise que Pierre Lescure qui préside le Festival et Thierry Frémaux ont assisté aux répétitions de la cérémonie d’ouverture et n’ont rien trouvé à redire à son texte, si ce n’est pour lui demander d’abandonner une blague embarrassante sur Nicole Kidman. Thierry Frémaux lui a même fait le rapport de son entrevue avec Woody Allen…Et le réalisateur américain aurait trouvé le pensionnaire de la Comédie française «drôle». Et Laurent Lafitte de conclure: «C’est triste de ne retenir que ces 20 secondes sur 45 minutes de discours».

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