« Rimbaud et Verlaine », le nouvel épisode des « Cahiers d’Esther »

Elle s’appelle Esther, a maintenant 11 ans, a un grand frère nommé Antoine (« un con ») et se rend tous les matins dans une école privée parce que son père ne veut pas la mettre dans le public (trop dangereux). Voilà un an et demi que la fillette mise en scène par Riad Sattouf, dessinateur adulé pour sa série « L’Arabe du futur », a pris place à la dernière page de « l’Obs ». Le premier tome de ses aventures, « Les Cahiers d’Esther »(1), est maintenant disponible en librairie.

Il est presque certain que les sociologues des années 2050 se pencheront sur « Les Cahiers d’Esther », et pour cause : si Riad Sattouf brouille les pistes pour qu’elle ne soit pas reconnaissable, Esther existe dans la vraie vie ! C’est une écolière parisienne de 11 ans, fille d’un couple d’amis, qu’il soumet presque chaque semaine à un petit interrogatoire dont, ensuite, il fait son miel. Si la vraie Esther ne porte pas ce prénom et n’habite pas dans le 17e arrondissement, tout ce qu’elle raconte est d’une justesse indiscutable.

« Tout est presque vrai » : rencontre avec Esther, l’héroïne de Riad Sattouf

Arnaud Gonzague

(1) « Les Cahiers d’Esther. Histoires de mes 10 ans », de Riad Sattouf (Allary Editions, janvier 2016, 16,90 euros).

Philippe Djian sort un nouveau livre: 10 choses à savoir sur l’auteur de “37°2 le matin”

1Petit boulot

En 1965, la mère de Philippe Djian réussit à faire entrer son fils comme stagiaire chez Gallimard. Apprenti magasinier, il croise Paul Morand, Raymond Queneau et autres gloires qu’il juge poussiéreuses, du haut de ses 16 ans. «Ça ressemblait à une maison de retraite», racontera-t-il plus tard.

2La Ferté-Bernard

Pour 1000 francs par mois, Djian devient, au début de sa carrière, caissier de nuit au péage de La Ferté-Bernard. Le salaire n’est pas grandiose mais, comme ses collègues, il pioche dans la caisse et rentre chez lui «des billets plein les poches». Reste que les nuits sont longues à La Ferté-Bernard. Djian, qui a déjà publié quelques textes dans «Détective», en profite pour écrire des nouvelles.

3« 37°2 le matin »

Avec l’adaptation au cinéma par Jean-Jacques Beineix de son roman «37°2 le matin»en 1986, Djian accède au statut de star. Quatre millions de spectateurs se pressent dans les salles pour découvrir la tornade Betty (Béatrice Dalle) et son amant Zorg (Jean-Hugues Anglade). En librairie, Djian devient l’écrivain rock numéro un. Ironie de l’histoire: ce n’est que vingt-cinq ans après qu’il fera connaissance de Béatrice Dalle, à l’occasion d’un documentaire télé. Timides et pudiques, ils oseront à peine s’adresser la parole.

43 mai 1968

Philippe Djian est lycéen quand éclate le mouvement étudiant. S’il descend lui aussi dans la rue, c’est surtout pour le fun, car les discours gauchistes le laissent de marbre. Plus tard, il restera fidèle à lui-même: bon vivant, mais apolitique.

5Voyages

Djian aime bouger. Après avoir posé ses valises dans les Corbières, pour y retaper une vieille bergerie, il part s’établir dans une île chic au large de Boston, Martha’s Vineyard. Puis ce sera la Suisse, le Pays basque (Biarritz), ou encore l’Italie, en 1991: avec Année, sa femme artiste, et leurs enfants, Djian prend ses quartiers d’été dans une magnifique villa au sud de Florence.

6Titres

Djian a le génie des titres, comme «Sainte-Bob» ou «Vers chez les blancs». Comment fait-il son choix ? C’est parfois le hasard qui a le dernier mot: «J’étais en Suisse. Je devais emmener ma fille dans une fête, mais il y avait une incroyable tempête de neige. J’ai quand même pris la voiture, mais j’ai versé dans le fossé. Quand je suis sorti de la bagnole, je me suis trouvé nez à nez avec un poteau indicateur où il y avait écrit: “Vers chez les blancs”. Sans doute le nom d’un hameau. C’est le titre, me suis-je dit.»

7Porno

Comment écrire un roman porno ? C’est l’une des questions qui taraudent Djian, l’un des maîtres en la matière. Pas un de ses récents livres qui ne comporte au moins une séquence incandescente. Dans «Vers chez les blancs», l’obsession du sexe culminait dans une scène d’anthologie, où un couple faisait bestialement l’amour devant une télé allumée pendant l’émission «Apostrophes».

8Nouveau roman

Dans «Dispersez-vous, ralliez-vous !» (Gallimard), Djian raconte les amours d’une adolescente, Myriam, avec un homme plus âgé, son nouveau voisin. Ils couchent ensemble et se marient. Mais Myriam, l’ex-gamine introvertie, a-t-elle vraiment changé ? N’est-elle pas toujours cette fille «complexée, meurtrie, inconsolable», capable de saccager sa vie et celle des autres? C’est un vers de Rimbaud, cette fois, qui a donné son titre au beau roman de Djian.

9Bourre-pif

Djian a souvent été traîné dans la boue par la critique et il en a souffert. Il n’a jamais oublié les attaques très virulentes d’Angelo Rinaldi. En 2007, il reçoit le prix Le Vaudeville. Le milieu de l’édition vient fêter le lauréat, à l’exception de Marc Lambron, membre du jury qui avait préféré assister à un concert des Who à Bercy. On raconte que Djian, qui avait plusieurs fois essuyé de très violentes critiques de sa part, s’apprêtait à lui casser publiquement la figure.

10Langue

Interrogez Djian sur son travail: il vous répondra invariablement que la seule chose qui l’intéresse, dans le métier, c’est la langue. Trouver non seulement le mot, mais la phrase juste, est son défi quotidien. Et retrouver le son de son époque pour être parfaitement en phase avec elle.

Didier Jacob

Philippe Djian : « Je ne suis pas un écrivain rock ! »

Paru dans « L’Obs » du 25 février 2016.

Loi Travail: Valls reste déterminé mais promet des «améliorations» au texte

Dans un entretien au Journal du Dimanche, le Premier ministre s’engage à des «améliorations» de la loi Travail sur «deux points» contestés, la création d’un plafond pour les indemnités prud’homales et l’extension du licenciement économique. «Concernant la barémisation pour les prud’hommes, disposition attendue par les chefs d’entreprise, des adaptations peuvent être possibles sans la remettre en cause. Nous allons en discuter», affirme-t-il.

Les syndicats réformistes (CFDT, CFE-CGC, CFTC, Unsa) demandent le retrait de l’article sur le plafonnement de ces indemnités lors de licenciements abusifs. Le texte initial prévoit que les dommages et intérêts ne dépassent pas 15 mois de salaire, selon l’ancienneté, alors que la pratique est un mois de salaire par année d’ancienneté.

Concernant le licenciement économique, le texte prévoit que les difficultés économiques de l’entreprise soient caractérisées (baisse du chiffre d’affaires, commandes, pertes d’exploitation). Les réformistes veulent que les juges puissent continuer à «apprécier la réalité des difficultés économiques».

Avec ses promesses d’«améliorations», le Premier ministre fait un pas en direction des syndicats alors que la semaine s’annonce tendue pour le gouvernement, qui doit modifier le projet de loi tout en évitant de froisser le patronat. Le passage en Conseil des ministres a été reporté de 15 jours, au 24 mars, pour tenter de trouver un compromis.

Manifestations et grèves dès mercredi

Prêt à des concessions, Manuel Valls se dit toutefois déterminé à refuser «l’immobilisme» et à faire voter le texte par le Parlement «avec les amendements nécessaires». «Il faut bien sûr répondre aux interrogations, aux inquiétudes, et lever les ambiguïtés, et faire évoluer ce qui doit évoluer. Il faut enrichir et compléter cet avant-projet de loi, concède-t-il. Mais ce qui serait terrible, c’est le statu quo», met-il en garde.

Interrogé sur un éventuel recours au 49-3 pour faire passer en force le projet de loi porté par la ministre du Travail Myriam El Khomri, il affirme n’avoir «jamais évoqué l’idée de mettre en œuvre le 49-3». «Moi, je veux convaincre les socialistes, les radicaux de gauche, les écologistes d’approuver cette loi mais je veux que la loi recueille aussi l’assentiment de tous ceux qui veulent réformer le pays», affirme-t-il. Il se dit «convaincu» qu’il y a une majorité «parmi les partenaires sociaux, comme au Parlement» pour réformer.

Lundi, seront reçues tour à tour à partir de 10 h 00 à Matignon, la CFTC, FO, la CGT, la CFDT et côté patronal, la CGPME pour des concertations bilatérales, qui vont s’achever mercredi avec l’Unsa, avant une réunion plénière le 14 mars. Les numéros un de ces organisations ont rendez-vous à Matignon avec le Premier ministre, entouré de Myriam El Khomri et Emmanuel Macron (Economie). En parallèle, Manuel Valls devra essayer d’éteindre un deuxième départ de feu mardi soir chez les députés PS, qui ont imposé l’idée d’un séminaire consacré au projet de loi.

Des manifestations et grèves sont prévues dès mercredi, à l’appel d’organisations de jeunesse et certains syndicats de salariés, dont FO et la CGT, contre une réforme «écrite par le Medef». Sept syndicats réclamant le retrait pur et simple du texte, dont la CGT, FO et Solidaires, ont en outre appelé à manifester et à faire grève le 31 mars contre un projet qui constitue une «régression sociale».

La pression n’est pas que dans la rue: la pétition en ligne contre le projet a franchi vendredi le cap du million de signatures, deux semaines après son lancement, une première. Et selon un sondage, deux Français sur trois s’attendent à une contestation sociale généralisée, tandis qu’une autre enquête affirme que sept Français sur dix sont opposés au projet de loi.

AFP

XXXXIV – Les Putra de La Fange sont de sortie.

BLE1690002 copie

Un couple très comme il faut, fusionnel , les Putra de La Fange ( Monsieur Maill.et sur FB )  à la soirée Groupe Chaud organisée par Gwenael Billaud ( avec Rugiada Cadoni Olivier Urman Orsten GroomRachel Marks  Léo Dorfner Tom de Peklin Clarisse Tranchard Virginie TrastourFaustine Ferrer Dom Garcia Clémence Veilhan Pascal Lievre Jérôme Cusin Deed Julius David Noir Monsieur Maill.et Anatoli Vlasov) au Cha cha club.

© Bruno Levy

Quand le patois jamaïcain du « Work » de Rihanna met à nu le racisme ordinaire

Depuis sa mise en ligne, le titre « Work » de Rihanna n’a eu de cesse de faire parler de lui : entre sa double réalisation par Director X et Tim Erem, ses scènes de twerk cadencées, le duo d’exs Rihanna / Drake… Pourtant, ce sont aujourd’hui les paroles qui « dérangent ». Car les internautes ont bien tenté de les décrypter, en vain. Car si la Barbadienne s’y exprime en anglais, une partie du titre est écrit en patois rasta (comme le thème de son clip inspiré de la Jamaïque), une langue qui a eu du mal à se faire comprendre à échelle mondiale. Ce langage, souvent appelé « dread talk » en référence aux dreadlocks des rastafaris qui le parlent, est un élément essentiel de la culture jamaïcaine, qui a vu le jour dès le XVIIIème siècle pour se libérer du joug colonial. Et dans les premières séquences de « Work », le message est clair : le titre raconte l’histoire de deux personnes qui veulent être ensemble mais qui n’ont pas été honnêtes l’une envers l’autre, où d’aucuns y ont vu un possible écho au passé de Drake et de Rihanna. Et pour certains passages… c’est le drame. Ici, le refrain :

[…] Work, work, work, work, work, work

He said me haffi (He said I have to)

Work, work, work, work, work, work!

He see me do mi (He saw me do my)

Dirt, dirt, dirt, dirt, dirt, dirt!

So me put in (So I put in)

Work, work, work, work, work, work

When you ah guh (When are you going to)

Learn, learn, learn, learn, learn

Meh nuh cyar if him (I don’t care if he’s)

Hurt, hurt, hurt, hurt, hurting […]

>>> Retrouvez les couplets en fin d’article

Vous avez dit « Mah nuh cyar if him » ? Ceux qui comprennent ne sont pas légion, le patois jamaïcain utilisé par la chanteuse ne s’adressant qu’à ceux qui le pratiquent. Ici, « Work » outre-passe les codes de la culture pop blanche et fait seulement écho aux connaisseurs des racines du Dancehall, un style de musique populaire jamaïcaine apparu dans les années 70 et qui correspondrait à une variante du reggae. Conclusion : le titre de la star américaine met en lumière une période précise de l’histoire culturelle de la Jamaïque. Un bel hommage qui a pourtant été pour les internautes l’occasion de se moquer de Rihanna au travers des mèmes à l’humour douteux. Ainsi, Le meme blog postait un peu plus tôt une vidéo Instagram où Rihanna, au moment de chanter, est remplacée par les marionnettes stéréotypées du film satirique Team America.

Une vidéo publiée par LE MEMÉ (@lememeblog) le 23 Févr. 2016 à 20h43 PST


Ailleurs, un post de Fuck Jerry, qui détourne les paroles de « Work » par une succession de lettres incohérentes.

Une photo publiée par Elliot Tebele (@fuckjerry) le 23 Févr. 2016 à 7h24 PST


En plus de ces blagues, qui semblent beaucoup amuser les internautes sur Instagram, il en va de même sur les autres réseaux sociaux, comme Twitter, où certains qualifient même les paroles de Rihanna de « gibberish », ce qui signifie littéralement « charabia ». Il n’y a pas plus clair.

work work work work work *gibberish*

work work work work work

— ANTIfuckboy (@ViBEGOD23) 27 février 2016

How can someone listen to a bunch of gibberish like ‘rihanna – work’ 0.o

My god

— Nauris (@Namatnieks) 18 février 2016

Racisme ordinaire

Ha, on rit, on rit, hein ? Pourtant, sous leurs airs innocents, ces mèmes ne pointent que la bêtise de ceux qui les font (ou les relaient en l’état). Un patois, du « charabia » ? Pour les ignorants euro-centrés, sans doute. Pour les autres, la blague force un sourire amer… Car non, le patois rasta n’est pas plus « incompréhensible » pour un anglophone que l’allemand, le chinois ou l’hindi. Car non, un langage peu médiatisé par la culture dite « occidentale » ne signifie pas pour autant qu’il est dépourvu de valeur. Et surtout, surtout, parce que comme toutes les langues vivantes, un langage existe au travers de ceux qui le parlent, qui ne sont pas plus « étranges » ou « exotiques » que les autres. Shame on you, Internet.

Laurianne Melierre et Laura Meunier

[refrain]

Dry! …Me a desert him (Dry, I’m going to desert him)

Nuh time to have ya lurking (No time to have you lurking)

Him ah go act like he nuh like it (He will act like he doesn’t like it)

You know I dealt with you the nicest (I dealt with you nicely)

Nuh body touch me you nuh righteous (Don’t touch me, you’re not righteous)

Nuh badda, text me in a crisis (Don’t bother to text me in a crisis)

I believed all of your dreams, adoration

You took my heart and my keys and my patience

You took my heart on my sleeve for decoration

You mistaken my love I brought for you for foundation

All that I wanted from you was to give me

Something that I never had

Something that you’ve never seen

Something that you’ve never been

But I wake up and act like nothing’s wrong

Just get ready…

[refrain]

Académie française: une élection à la fois comique et consternante

Si cette élection du 3 mars 2016 à l’Académie française était un film de Tarantino, un western spaghetti du Quai Conti, on y verrait une poignée de lascars assoiffés de gloire, prêts à tout pour s’asseoir sur le fauteuil de la regrettée Assia Djebar – le numéro 5, à pourvoir depuis son décès il y a un an. Sauf que ce n’est pas un film, mais un psychodrame consternant, énième épisode de l’effondrement intellectuel dont l’institution, autrefois prestigieuse, offre désormais le spectacle à chaque élection.

Au début, on était encore entre gens de bonne compagnie. Se voyant porter l’habit, Frédéric Mitterrand annonça sa candidature pour renoncer finalement, sentant que l’affaire était loin d’être gagnée. Excellent critique, Jean-Claude Perrier déclara également forfait. Les candidatures les plus farfelues se mirent à affluer alors, multitude paradoxale quand on sait la difficulté de l’Académie à trouver immortel à son pied.

Il y a une trentaine d’années, ce club longtemps masculin eut la bonne idée, hardie pour ces messieurs, de considérer que les femmes, après tout, faisaient aussi partie du genre humain (Marguerite Yourcenar servit de cobaye en 1980, prévenant cependant qu’il ne faudrait pas compter sur elle pour les séances du dictionnaire). Toujours est-il que, la mortalité ayant, sous la coupole, battu tous les records, l’Académie se mit à ratisser large. Journalistes, paroliers, j’en passe – l’Académie n’a jamais été aussi égalitaire, démocratique, anar presque.

D’avoir ainsi abaissé constamment le niveau a donné des idées au vulgum – l’élection d’aujourd’hui en offre une bien piteuse illustration. Vous n’avez sans doute jamais eu vent de l’œuvre de Michel Carassou, qui s’est porté candidat. C’est, figurez-vous, un spécialiste du surréalisme. A une époque, André Breton crachait pourtant sur l’institution et sur certains de ses membres (Anatole France notamment). Eduardo Pisani aimerait lui aussi faire partie de la noble assemblée. Né à Naples, il s’est fait connaître en poussant la chansonnette (« Je t’aime le lundi »). Un chanteur donc. Voilà qui devrait réveiller l’ambiance, après qu’on a réfléchi, sur la question des oignons, à la manière de peler le mot dans l’idée de mieux l’écrire.

«Poète, blogueur et chroniqueur», tel se proclame Eric Dubois qui s’est porté candidat le 4 février. Décidément, ce n’est plus une ondée passagère. A l’actif de Dubois, une «vingtaine» de livres publiés, selon l’intéressé. Pour faire pencher un peu plus la balance de son côté, notre nouveau René Char se dit «militant actif de la cause poétique et de la condition de la poésie et des poètes». Et de noter qu’on «étudie certes encore la poésie dans les écoles, les collèges, les lycées et les universités, mais qu’à mesure que l’adulte pris par des préoccupations familiales, sociales et professionnelles se sent attiré par les divertissements populaires, son goût ou son intérêt s’en éloigne. Je n’ai pas ici à faire le procès de la Société de Consommation et du Spectacle. N’est pas Marx ou Debord qui veut !» Et n’entre pas à l’Académie qui en rêve! Dieu merci, notre sympathique candidat ne se fait pas trop d’illusions : «J’ai peu de chance d’être élu. Je vais avoir cinquante ans. Je suis encore un jeune poète.»

Andrei Makine est, lui aussi, sur les rangs. Russe d’origine, Andrei a un univers, une langue, un talent indéniables. L’Académie sauvée des eaux ? Pas sûr. Car pour Olivier Mathieu, un pamphlétaire qui a traité Finkielkraut de «vrai néo-con» et qui vient de s’en prendre à Eric Dubois, Makine est le pire choix possible. Pas étonnant, puisque lui-même est candidat !

«Vous prenez un faux-dissident (notre époque est remarquable par son taux considérable de toc, toqués et tocards aux commandes), écrit Mathieu, un marchand de Russie « éternelle », un marchand de malheur juif « éternel », un cracheur dans la soupe « éternelle » française, un odieux réactionnaire « éternel »qui semble avoir les pauvres en aversion – le tout en un seul homme – vous touillez à peine et vous obtenez un parfait « français de souche » élu magistralement à l’Acacadémie française ». L’auteur de ces lignes, négationniste avéré et admirateur de Faurisson, fait profession, depuis une vingtaine d’années, de se présenter à l’Académie sous des noms différents, Robert Pioche ou Robert Spitzhacke.

La tournure qu’a pris cette élection est, on le voit, aussi comique que consternante. Et la liste n’est pas close. Un poète blogueur, Yves-Denis Delaporte, figure également sur la liste. Sans doute pour se trouver un logement: on lisait récemment, dans la rubrique faits divers de «Sud-Ouest», que ledit poète, fonctionnaire de l’Education nationale, s’était attiré les foudres de sa hiérarchie.

Instamment prié par le tribunal administratif de libérer son logement de fonction du collège Élisée-Mousnier, l’ex-gestionnaire, de retour à Cognac après un séjour à Nice, livre sa version de l’histoire. « On a presque l’impression que je bloque la situation par méchanceté. J’étais en train de préparer mon déménagement pour Rochefort, j’avais dit que je partirais le 1er septembre », s’efforce-t-il de rassurer. Place devrait être faite à la nouvelle gestionnaire, cantonnée dans un logement du collège Claude-Bouchet depuis un an et en butte à des voisins irascibles.

En somme, bientôt à la rue, Delaporte s’est dit que l’Académie, c’était toujours mieux que les HLM.

Aux dernières nouvelles, un jeune homme de 15 ans, Valentin Ogier, viendrait également de déposer sa candidature. Et allez donc! Scolarisé à Lamballe, il a reconnu n’avoir aucune chance, mais a expliqué vouloir «faire passer un message d’optimisme pour prouver que la jeunesse d’aujourd’hui n’est pas perdue et ne va pas dans le mur».

On le voit, l’Académie est devenue le bureau des pleurs pour idéalistes, paumés et mécontents en tout genre. La prochaine fois, on aura droit à l’éleveur de porc poète. Pas étonnant, en tout cas, que nos habits verts broient du noir. Au point que certains d’entre eux font désormais du porte à porte pour tenter quelques pointures. Jean d’Ormesson n’a-t-il pas, il y a quelques jours, fait de la retape auprès du comédien Fabrice Lucchini, en déclarant qu’il aurait sa place à l’Académie ?

Didier Jacob

Le républicain Ben Carson annonce la fin de son aventure présidentielle

Le neurochirurgien à la retraite Ben Carson a annoncé mercredi qu’il ne voyait pas d’avenir à sa candidature aux primaires républicaines pour la Maison Blanche et qu’il ne participerait pas au prochain débat télévisé. «J’ai décidé de ne pas participer au débat présidentiel républicain sur Fox News demain soir», a déclaré Ben Carson dans un communiqué. «Je ne vois pas de chemin politique pour continuer, après les résultats des primaires d’hier soir», a-t-il ajouté, déclarant implicitement qu’il jetait l’éponge après dix mois de campagne. Ben Carson, dans son communiqué, n’a pas formellement retiré sa candidature, mais il a indiqué qu’il évoquerait «l’avenir de ce mouvement» lors d’un discours vendredi au grand rendez-vous annuel des conservateurs américains, près de Washington.

Le docteur, seul Noir de la course, avait été deuxième des sondages républicains de septembre à début décembre, derrière Donald Trump, le rattrapant même dans quelques enquêtes. Comme le milliardaire, Benjamin Carson, 64 ans, n’avait jamais exercé de mandat politique avant de se lancer. Il avait mené une brillante carrière comme chef du service neurochirurgie pédiatrique du grand hôpital Johns Hopkins de Baltimore, adaptée dans le film Des Mains en or (Gifted Hands), avec Cuba Gooding Jr. dans le rôle du médecin. Auteur de plusieurs livres, il avait pris sa retraite en 2013 pour se lancer comme orateur conservateur, très populaire notamment au sein du Tea Party.

A lire aussiLes primaires américaines, comment ça marche ?

Malgré ses manières d’église, le docteur Ben Carson cultive le «politiquement incorrect» et a scandalisé beaucoup à gauche par des déclarations provocatrices sur l’homosexualité, l’esclavage, l’Holocauste, les armes, les musulmans… En septembre, il avait affirmé qu’aucun musulman ne devait devenir président des Etats-Unis, l’islam n’étant selon lui pas en adéquation avec la Constitution. Une polémique avait éclaté en novembre sur la véracité de certaines anecdotes de son enfance.

Vidéo : cinq inepties du candidat républicain Ben Carson

Il était à la peine dans la course des primaires, après une quatrième place aux consultations de l’Iowa le 1er février. Les primaires du «super mardi», dans 11 Etats, n’ont qu’accentué sa marginalisation, le médecin échouant à rassembler les voix des chrétiens évangéliques.

A lire aussiPourquoi les primaires américaines n’ont-elles pas toutes lieu le même jour ?

S’il confirme son retrait, il restera quatre candidats en lice pour les primaires républicaines: Donald Trump, les sénateurs Ted Cruz (Texas) et Marco Rubio (Floride), et le gouverneur de l’Ohio, John Kasich.

AFP

PHOTOS. Serge Gainsbourg, ex-fan des seventies

Aux très nombreux admirateurs de Serge Gainsbourg qui s’aperçoivent cette année avec nostalgie que l’auteur de Melody Nelson s’en est allé il y a 25 ans, la Galerie de l’Instant offre une plongée dans la décennie 1970 avec des images intimes, inédites pour la plupart, issues du fond d’archives du photographe Tony Frank, qui l’a suivi durant toute sa carrière. Elles montrent avec évidence la beauté et l’élégance de celui qui ne s’aimait pas, son regard intense et ironique, et sa complicité avec Jane Birkin, qui illumine chacune des images dans lesquelles elle apparaît. À découvrir du 11 mars au 31 mai, au 46, rue de Poitou à Paris. Ici, « Normandie, 1969 ».

(Tony Frank/La Galerie de l’Instant)

« Saint Amour » : Depardieu et Poelvoorde trinquent au Salon de l’Agriculture

Pour donner à son taureau le noble nom de Nabuchodonosor, il faut aimer les bouteilles. Sinon les grandes bouteilles, du moins les bouteilles grandes, celles qui contiennent beaucoup (15 litres, en l’espèce). Toujours est-il que Jean amène Nabuchodonosor à Paris, au Salon de l’Agriculture, et que son fils, Bruno, les accompagne. Bruno qui, chaque année, passe de l’Alsace à la Bourgogne, du Rhône à la Loire et au Languedoc sans quitter le Salon. Il s’arrête en effet à chaque stand pour faire honneur aux produits locaux. Sauf que, cette fois-ci, la route des vins, ils vont la suivre dans le taxi de l’imprévisible Mike (Vincent Lacoste), et elle se révélera pentue, comme le gosier des lascars.

Jean, c’est Depardieu, chemise à carreaux, toque blanche et bonbonne en avant, et Bruno, qui trime toute l’année, écrasé par le paternel, c’est Poelvoorde. Si Bruno n’a pas trouvé encore la femme de sa vie, qu’il cherche sans y croire vraiment, le premier a perdu la sienne, mais il lui parle pourtant, laissant sur son téléphone portable des messages que, de l’au-delà où elle se trouve désormais, elle entendra peut-être.

Depardieu tel qu’en lui-même

Jolie idée dans un film qui en compte pas mal d’autres et que traversent des personnages comme seuls Delépine et Kervern savent les dessiner. Au premier rang desquels on placera un propriétaire de gîte incarné par Michel Houellebecq : la visite des lieux et les explications qu’elle suscite de sa part forment une scène qui mérite la citation. En chemin ils rencontrent aussi une belle cavalière prénommée Vénus à laquelle Céline Sallette prête son allure et sa grande maîtrise, une jeune serveuse de restaurant qui ne se la raconte pas… enfin que des gens sympathiques, du moins presque.

C’est ainsi que Delépine et Kervern continuent de faire souffler sur le cinéma français un vent de fraîcheur qui tranche et qui taille. Alors, peu importe si, par instants, leur « Saint Amour » sent vaguement le bouchon, leur cinéma a du cœur, des tripes et de la cuisse. Et puis, de même qu’entre le père et le fils le passage de témoin est réalisé, entre Depardieu et Poelvoorde le basculement s’opère, qui offre au premier nommé de se montrer réellement tel qu’en lui-même, aussi grand qu’il l’est toujours, mais également touchant et profondément attachant.

Pascal Mérigeau

« Saint Amour« , par Benoît Delépine et Gustave Kervern. Comédie française, avec Gérard Depardieu, Benoît Poelvoorde, Vincent Lacoste, Céline Sallette, Michel Houellebecq (1h41).

A propos

FRANCE MEETINGS EST UN PETIT BLOG SANS PRÉTENTION SUR LE BEAU PAYS QU'EST LA FRANCE. C'EST DE L'ACTU, DE LA CULTURE, DE LA POLITIQUE, DE L'ECONOMIE... TOUT SUR LA FRANCE.