Mois : juillet 2015

A Reims, emballement après l’agression d’une jeune fille en maillot de bain

La violence de la scène est incontestable, ses circonstances sont, elles, d’abord restées troubles. Dans un article publié samedi, l’Union de Reims (Marne) affirme que le mercredi précédent, une jeune femme de 21 ans a été lynchée par cinq autres, âgés de 16 à 24 ans, au motif qu’elle bronzait en maillot de bain dans le parc Léo Lagrange. D’autant plus explosif que selon le récit publié samedi, une des jeunes filles se serait approchée pour reprocher à la victime sa tenue contraire à «sa morale et ses mœurs». Et voyant que la jeune femme ne comptait pas se rhabiller, le reste de la bande a alors été appelé en renfort pour la rouer de coups. Des témoins se seraient alors interposés. Transportée au CHU de Reims, la victime s’est vue prescrire quatre jours d’ITT (incapacité totale de travail).

Mais dimanche à 10 h 30, le journal met discrèetement à jour son article, précisant l’avoir publié la veille «sans connaître les motivations précises de l’agression»: «on ignore les propos tenus par les jeunes filles qui ont molesté la victime.» Premier trouble. D’autant que samedi dans la nuit, sur Facebook, une personne se présentant comme une des agresseuses présumées conteste la date des faits et en livre une autre version: «il n’a jamais été question de tout ce qui est écrit», assure-t-elle, ajoutant qu’elle a pour sa part fait l’objet de 10 jours d’ITT. «Je n’ai fait que séparer et c’est moi qui me suis fait agresser», explique cette jeune femme, évacuant les accusations d’agression à caractère religieux – «non mais allô, faut tout simplement arrêter de raconter de la merde».

Et dimanche après-midi, loin de confirmer le «discours de police religieuse» prêté la veille par l’Union à l’auteure principale présumée de l’agression, le parquet de Reims affirme que «ni la victime ni les auteures des coups n’ont fait état, lors des auditions, d’un mobile religieux ou d’un mobile moral qui aurait déclenché l’altercation». «C’est une altercation entre jeunes filles qui dégénère après qu’une des auteures de l’agression a dit: «Allez vous rhabiller, ce n’est pas l’été», a précisé  à l’AFP la commissaire de permanence, Julie Galisson. Une des femmes ainsi interpellée ne s’est pas laissée faire et cela a dégénéré en violences.» 

Contactée par BuzzFeed France, une des cinq filles mises en cause, âgée de 19 ans, raconte: «J’étais en effet avec trois amies et ma petite sœur mercredi vers 16h30, quand nous sommes allées au parc Léo Lagrange. Nous sommes passées devant trois filles en maillot de bain et j’ai juste dit à ma copine que si c’était moi, je n’oserais pas me mettre dans cette tenue. Mais j’ai dit ça car je suis complexée, absolument pas pour des questions religieuses ou morales. Je suis musulmane oui, mais tolérante». Elle réfute ensuite tout «lynchage»: «Lorsque l’une des trois filles m’a entendue parler, elle m’a interpellée pour me dire qu‘«avec mon physique, elle comprenait que je n’ose pas me mettre en maillot». Elle a également dit que j’étais grosse. Je suis allée vers elle pour lui donner une gifle, puis elle s’est battue avec mon amie. À partir de là, j’ai tout fait pour les séparer. Elles se sont battues seulement toutes les deux, avant que des témoins puis un policier en civil ne s’interposent.»

Vives réactions

Dimanche, le maire LR de la ville, Arnaud Robinet, dénonçant «la bêtise humaine» de cet acte, a pris soin de juger «intolérable de stigmatiser une communauté ou une autre pour un acte commis par quelques-uns et sans connaître le fond de cette affaire.» Il faut dire que malgré la confusion, les réactions enflammées s’étaient multipliées. Samedi 17h30, l’émotion montant, Robinet commence par diffuser l’article de l’Union, accompagné du commentaire: «Intolérable sur notre territoire. Je condamne fermement cette agression». Au même moment, dans la «fachosphère», on s’en donne à cœur joie sur le thème du «laboratoire de la charia» tel le mariniste Karim Ouchikh, patron du SIEL, ou de «la charia en bas de chez soi» comme le sénateur FN, Stéphane Ravier. A droite, le député des Alpes-Maritimes Eric Ciotti entonne un refrain similaire, fustigeant dès samedi une attaque de «notre» «mode de vie»:

Agression inacceptable par laquelle on veut nous imposer un mode de vie qui n’est pas le notre. Intransigeance ! https://t.co/OG57jhBesD

— Eric Ciotti ن (@ECiotti) 25 Juillet 2015

Intolérance, dimension religieuse ou bêtise crasse ?

Dimanche matin, c’est donc un Robinet en mode on calme le jeu, qui déclare : «Il semble qu’il n’y ait pas d’argument religieux à cette agression», précisant que «toutefois, pour la population rémoise, cette agression est prise comme telle.» L’Union ne laissait en effet que peu de place au doute. Appelant «à ne pas tomber dans un amalgame» sans avoir les résultats de l’enquête, le maire de Reims prêche dans le désert. Dimanche midi, SOS Racisme Reims organise un (micro) rassemblement en maillots de bain dans le parc Léo Lagrange. Sur Twitter, Nadine Morano (LR) tweete, elle, une photo de Bardot en bikini (comme l’été dernier quand elle avait flashé une femme voilée sur la plage). Florian Philippot (FN), qui était justement chez Bardot récemment, estime dans le même ton que la jeune femme a été lynchée pour sa façon de vivre «à la française». Sur Twitter, le hashtag #jeportemonmaillotauparcleo cartonne, attirant pêle-mêle des messages de sympathie pour la victime, minoritaires, des commentaires sexistes, en nombre, et aussi un flot de sentences xénophobes.

Oui j’appelle à l’apaisement car personnes ne connaît le fond de cette affaire. Laissons la justice et la police faire leur travail. (2)

— Arnaud Robinet (@ArnaudRobinet) 26 Juillet 2015

La plus jeune mise en cause, 16 ans, a fait l’objet d’une convocation devant le délégué du procureur tandis que l’auteure principale, 17 ans, a été placée sous le statut de témoin assisté – décision dont le parquet a fait appel. Les trois autres, majeures, comparaîtront le 24 septembre pour «violences en réunion» devant le tribunal correctionnel. Il reviendra alors au juge de faire la part des choses entre intolérance, bêtise crasse et dimension religieuse. Sans écarter, même, une rixe aux ressorts plus banals. L’un n’excluant d’ailleurs pas les autres.

Sous les draps de la Chinafrique

L’offensive chinoise est un fait majeur dans l’économie africaine. Au quotidien, le marché hôtelier constitue pour le voyageur l’un des principaux marqueurs de cette réalité.

Une capitale d’Afrique francophone, été 2015.

La présence chinoise, de plus en plus importante – BTP, hôtellerie et quincaillerie au premier chef – semble ne pas être affectée par les récents événements politiques de la capitale. Ou plutôt elle semble, comme dans de nombreux pays d’Afrique, préférer les ignorer. On continue à traiter business comme partout ailleurs. Désormais, les négociants français sont les derniers à parfois souffrir un barrage de la langue en Afrique francophone : leurs interlocuteurs chinois leur proposent assez rapidement l’anglais – mais disposent finalement toujours d’un responsable qui amorce ou aboutit, suivant les nécessités, les négociations en français.

Comme dans de nombreux hôtels ou restaurants chinois en Afrique, le décorum semble immuable : lampions rouges à l’entrée, carrelage au sol dont le rapport qualité-prix laisse deviner la rapidité de construction et la standardisation qui a présidé aux travaux, fresque orientalisante sur les murs aux motifs pseudo-traditionnels, chaises industrielles en faux bois laqué… La cuisine de l’hôtel cherche à peine à offrir quotidiennement autre chose que des plats chinois. Rapport qualité-prix garanti face aux restaurants de cuisine occidentale. Mais si loin des «maquis» dont l’existence ne semble même pas effleurer les gérants chinois de ces hôtels-restaurants. Le buffet chinois est même devenu, dans certains restaurants d’hôtel, une attraction «à volonté» certains soirs de la semaine dans certaines capitales africaines.

L’hôtel est un huis-clos volontaire et recherché. De la chambre au restaurant, en passant par le salon du hall où s’effectuent des négociations jusqu’aux loisirs : tout est fait pour assumer une vie «insulaire». Dans le périmètre des murs de l’hôtel, parmi l’archipel des bâtiments, l’un d’entre eux le casino. Dans la salle de jeux comme au restaurant, les croupiers comme les serveurs sont des Africains dirigés par un Chinois ; les clients sont presque exclusivement des Chinois et des Occidentaux – à l’exception d’un ou autre invité Africain qui accompagne souvent des Occidentaux ou plus rarement des Chinois. Cette sociologie renforce le sentiment d’une sorte de «gated community» érigée au sein de l’hôtel.

A l’entrée des hôtels comme dans les rues, on peut croiser en quelques minutes des dizaines de petits moto chinoises qui noient désormais le marché des transports, inventant quasi-littéralement un marché du transport urbain en deux-roues.

La communauté chinoise s’ancre efficacement dans la capitale : le nombre d’hôtel au nom chinois se multiplie ; plusieurs d’entre eux offrent un espace privilégié d’hébergement de membres de la communauté.

En s’égarant dans certaines zones d’hôtel, on découvre des portes pas comme les autres. Le système général est le même que pour les autres chambres : la porte proprement dite est précédée d’une grille. Sauf que les portes et les grilles apparaissent de meilleurs qualité, plus neuves, plus solides, et qu’elles se distinguent surtout par des motifs chinois sur les ferronneries ou autour des judas.

Pour les plus distraits, un rapide zapping des chaînes télévisées suffit à rappeler cette évolution : CCTV4, l’emblématique chaîne chinoise, fait ici jeu égal avec Canal+, TV5 Monde Afrique, France 24 et Al Jezeera. Aucune d’entre elle n’est sous-titrée. La chaîne nationale est noyée face à cette concurrence et les chaînes privées du pays peinent à être trouvées : au fond, seule la diffusion satellitaire de la RTS rappelle la place des médias TV africains… alors que Dakar est distant de plusieurs milliers de kilomètres, si loin de ce poste de télévision et inconnu de l’essentiel des habitants de cette capitale.

Avis aux lecteurs-voyageurs : cette description est inspirée d’un authentique hôtel chinois, où ont été prises les photos. Africa4 vous invite à identifier ce lieu. Un indice (peu connu) : l’hôtel est tenu par des Chinois de Taïwan et non des Chinois du régime de Pékin.

Ingrid Sischy, fin de revue

C’était l’un des noms les plus connus du journalisme lifestyle, une figure de la presse anglo-saxonne, une personnalité mondaine au look unique, une esthète qui avait décidé de s’amuser dans le bac à sable de la comédie sociale: Ingrid Sischy est morte vendredi à New York d’un cancer du sein. Elle avait 63 ans.

Petite, ronde, les yeux toujours cerclés de grosses lunettes, Ingrid Sischy traînait son esprit vif et acéré dans les vernissages, défilés de mode, principalement à New York dont elle était une des figures mais également en Europe. Elle était née à Johannesburg et avait grandi en Ecosse. Après l’université, elle intègre le monde de l’art, travaille pour des éditeurs, et, de 1979 à la fin des années 80, est la tête d’ArtForum, le magazine-bible du milieu. En 1982, elle fait sensation avec une photo de mode en couverture de la revue d’art, provoquant l’effroi des puristes et l’admiration de ceux qui anticipent déjà le grand brouillement des genres. Elle devient amie avec Mapplethorpe, Basquiat et tant d’autres. En octobre 1986, le New Yorker (auquel elle collaborera longuement) la qualifie de «fille du Zeitgeist».

Mais si le nom d’Ingrid Sischy évoque autant le New York de la splendeur des 80s, c’est qu’elle fut à la tête de la revue la plus adaptée à l’époque. En 1988, elle prend les rênes du magazine Interview, fondé par Andy Warhol en 1969. Le pape pop est mort l’année précédente, à Sischy la tâche de relancer la publication. Le résultat sera exceptionnel, explosant les chiffres de vente, les pages accueillant la mutation de la contre-culture vers l’ère de la célébrité. L’Interview warholien était glamour, mais c’était un glamour de l’entre-soi ; Sischy parvient à dessiner un glamour plus appréhensible de tous.

Interview est la propriété de Brant publications. Les échotiers new-yorkais se délectent, au milieu des années 90, du couple que forme Sischy et Sandra Brant, l’épouse du PDG du groupe. A partir de la fin des années 90, Sischy collabore à Vanity Fair, et en deviendra ensuite «International» avec sa compagne, travaillant sur les diverses éditions de la revue.

Dans un billet publié sur le site de Vanity Fair, Anne Boulay, rédactrice en chef de l’édition hexagonale, écrit: «Grâce à elles, les lecteurs français ont eu un accès inédit aux coulisses de Hollywood. D’ailleurs, c’est Ingrid qui a signé la première cover story de la version française de Vanity Fair, faisant de Scarlett Johansson la plus parisienne des stars américaines. C’est à elle aussi que l’on doit l’inoubliable confession de John Galliano, l’intimité de Jeff Koons, les confidences de Kristen Stewart et, tout récemment, celles d’Anjelica Huston.»

De Cuba à la Corée du Nord : cinq vidéos à voir cette semaine

Les cinq étapes du dégel des relations entre Cuba et les Etats-Unis, les déplacements de Nicolas Sarkozy à l’étranger et cinq groupes et chanteurs nord-coréens qui font l’éloge de leur pays et de leur dirigeant. Les vidéos à ne pas manquer cette semaine.

Lundi, Cuba et les Etats-Unis

Les Etats-Unis et Cuba ont officiellement rouvert leurs ambassades lundi. Une première depuis cinquante-quatre ans, qui concrétise le dégel des relations entre les deux pays du continent américain. Depuis décembre 2014, les gestes des Etats-Unis envers l’île castriste se sont multipliés. Barack Obama, le président américain, et son homologue cubain, Raul Castro, avaient simultanément pris la parole le 17 décembre 2014 pour annoncer une normalisation de leurs relations ainsi que la libération de prisonniers. Avec l’ouverture des ambassades, une nouvelle étape est franchie. Mais la question de l’embargo américain contre Cuba reste au cœur des négociations pour arriver à une véritable entente entre les deux pays. Retour en images sur cinq moments-clés du dégel des relations entre La Havane et Washington.

Mardi, Sarkozy

Le président du parti Les Républicains (LR) est le champion des déplacements officiels. Tunisie, Maroc, Israël… En seulement cinq mois, Nicolas Sarkozy s’est rendu à de nombreuses reprises à l’étranger. Des voyages dont la fréquence s’est accélérée ces dernières semaines, le dernier datant de lundi, à Tunis, où il s’est attiré les foudres des Algériens après un dérapage remarqué. Outre les polémiques, c’est surtout son attitude qui intrigue. L’ex-président de la République n’hésite d’ailleurs pas à rencontrer ses anciens homologues en marge de ses conférences, comme s’il occupait encore son poste à la tête de l’Etat.

Mercredi, le décès d’une jeune noire

Sandra Bland est morte le 13 juillet, étouffée dans sa cellule à l’aide d’un sac plastique. Cette jeune femme noire était incarcérée depuis trois jours à Naperville, au Texas, pour avoir oublié son clignotant. Sa famille refuse la thèse du suicide, avancée par les policiers. Une enquête, confiée au FBI, a été ouverte, concluant finalement à un suicide. Pour se justifier, la police avait diffusé une vidéo de l’arrestation, reprise par les chaînes de télévision américaines. Mais toutes n’ont pas traité le sujet de la même manière, évitant notamment de mentionner le fait que Sandra Bland était noire. 

Jeudi, des politiques sur le Tour

Nicolas Sarkozy a fait son retour jeudi sur les routes du Tour de France. Après une arrivée discrète en hélicoptère, il a rejoint le directeur de la course, Christian Prudhomme, pour suivre la fin de l’étape dans sa voiture. Tradition oblige, François Hollande s’est lui aussi rendu sur la Grande boucle le 16 juillet dernier. Mais les chefs d’Etat et anciens présidents de la République ne sont pas les seuls à arpenter les routes du Tour. Manuel Valls, Christian Estrosi ou encore Patrick Kanner ont eux aussi encouragé les cyclistes cette année.

Vendredi, en Corée du Nord

En Corée du Nord, le girls band Moranbong Band, fondé en 2012 par et pour Kim Jong-un, fait un carton. La plupart de leurs chansons sont des éloges du dirigeant nord-coréen et chantent les valeurs du pays. Un succès qui n’est pas le premier. Dès la fin des années 70, le groupe Wangjaesan Troupe reprenait le répertoire socialiste sur scène. En voici cinq exemples.

Bientôt un film sur les emoji ? Voici à quoi ça pourrait ressembler

Alors que « Pixels », un film sur des personnages de jeux vidéo d’arcade, est dans les salles depuis mercredi, un nouveau projet du genre est en préparation. Le site Deadline a révélé mardi 21 juillet que Sony Pictures Animation allait produire un long-métrage d’animation qui porte sur les emoji, ces petites icônes que l’on s’échange par SMS.

Le film sera réalisé par Anthony Leondis, qui a déjà à son actif le court-métrage d’animation « Kung Fu Panda : Les secrets des Maîtres » et « B.O.O. (Bureau des Opérations d’Outre-monde) », avec les voix de Bill Murray, Melissa McCarthy ou encore Seth Rogen. Pour les producteurs, l’affaire emoji est intéressante : contrairement aux Lego par exemple, il n’y a aucun droit à acquérir.

Nés au Japon en 1999, l’usage des emoji a récemment explosé, notamment lorsqu’ils ont été introduits sur les claviers iOS en 2011 et Android en 2013. Ils vivent aujourd’hui leur heure de gloire. Ils sont présents dans la mode (emotiKarl, l’application d’emoji à l’effigie de Karl Lagerfeld et à celle de sa chatte Choupette), la variété (le clip « Roar » de Katy Perry) en passant par l’associatif (campagne de WWF) jusqu’aux rangs de la politique (Julie Bishop, la ministre australienne des Affaires étrangères et présidente du Conseil de sécurité des Nations unies à New York, est une fervente utilisatrice des emoji sur son compte Twitter).

Le « Guardian » a aussi choisi de traduire tout le discours de Barack Obama sur l’état de l’Union. Le président américain a lui-même salué « le karaté, le karaoké, les mangas et les animés, et bien sûr, les emoji » lors d’une visite du Premier ministre japonais Shinzo Abe fin avril.

Du ballon de rugby à l’Apple Watch

Mais comment ces visages, le plus souvent jaunes, statiques, pourraient-ils raconter une histoire ? La bibliothèque d’emoji Unicode compte une petite centaine de smileys, 15 familles, des couples hétéro et homo et 9 chats très expressifs. Tous les personnages peuvent être déclinés dans plusieurs couleurs de peau grâce à une récente mise à jour. Pour le reste, on trouve des animaux et des végétaux, des fruits, des légumes et autres mets, divers objets allant du ballon de rugby à l’Apple Watch, de nombreux coeurs ainsi que 42 drapeaux.

A « l’Obs », nous avons essayé de traduire des scénarios de films existants en emoji. L’expérience prouve que c’est tout à fait faisable : couteau et pistolet pour les films d’action, coeurs et larmes pour les comédies romantiques et même aubergine pour les scènes de sexe. Voici nos essais :

Pour « Matrix », un seul indispensable pour représenter Neo : l’émoticône avec des lunettes de soleil.

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— Boris Manenti (@manenti_boris) July 23, 2015

Dans la comédie romantique « 30 ans sinon rien », une maison de poupée magique transporte Jennifer Garner dans le futur. Le temps de se rendre compte que le bon garçon était sous ses yeux depuis ses 13 ans. Un film avec beaucoup d’emoji qui pleurnichent.

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— Amandine Schmitt (@amandecherie) July 23, 2015

Plus difficile : reproduire un James Bond. Pour « Skyfall », il a fallu utiliser plusieurs drapeaux de pays différents et à peu près tous les icônes représentant des moyens de transport.

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— Amandine Schmitt (@amandecherie) July 23, 2015

Dans « Her », Joaquin Phoenix tombe amoureux d’un système d’exploitation. On appuie constamment sur l’emoji téléphone portable.

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— Amandine Schmitt (@amandecherie) July 23, 2015

Il manque cruellement l’emoji requin pour refaire « Sharknado » – il sera remplacé ici par un dauphin. Pas non plus de tronçonneuse, mais on a un couteau, un marteau et des muscles bien sûr.

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— Boris Manenti (@manenti_boris) July 23, 2015

Tant qu’on a des maillots de bain, on peut faire comprendre qu’on parle de « Spring Breakers » (même si on n’a malheureusement pas de cagoules).

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— Amandine Schmitt (@amandecherie) July 23, 2015

On devine à peu près « Mad Max : Fury Road » grâce au cortège de voitures. Faute d’emoji moto, on a utilisé des vélos.

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— Amandine Schmitt (@amandecherie) July 23, 2015

Plus dur à reconstituer : la saga « Star Wars ». Pour l' »Episode IV : Un nouvel espoir », Dark Vador apparaît en diable violet, les Storm Troopers en garde de la reine d’Angleterre. Les points d’exclamation remplacent les sabres laser.

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— Boris Manenti (@manenti_boris) July 23, 2015

Plus facile : « Titanic ». On aurait pu se contenter de la combinaison paquebot + vague, mais nous avons voulu détailler un peu le film. On retrouve la fameuse scène de dessin de nu mais aussi celle de la voiture embuée – une bonne occasion d’utiliser l’emoji aubergine.

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— Amandine Schmitt (@amandecherie) July 23, 2015

N’hésitez pas à nous proposer les vôtres sur Twitter avec le mot-clé #ScenarioEmoji.

Amandine Schmitt

Dans la crise de l’élevage tout le monde à tort l’Etat, l’éleveur et l’Europe

La vache de Léon ne rit plus
Un vache lors d’un concours de beauté à Oldenburg, dans le nord de l’Allemagne, le 13 juin 2013. Photo Friso Gentsch / AFP

Faut-il regretter l’époque de Léon Bel, le fromager jurassien qui amusait les vaches avec Benjamin Rabier, l’illustre illustrateur? Les agriculteurs de l’Ouest de la France pris au piège de l’agriculture industrielle ne comprendront pas qu’on fasse référence à ce qui leur apparaîtrait comme le temps de la bougie, qu’autrefois, Martine tenait, certes, bien sa ferme, mais les temps ayant changé, la vache de Léon peut bien rire, cela ne les regarde plus… C’est bien mal connaître la géographie de l’agriculture en France en pensant que l’incurie régnant dans les régions productivistes est juste un mauvais concours de circonstances entre réforme de la PAC, pratiques condamnables de la grande distribution et marché mondial saturé.

Des visiteurs dans une exposition consacrée à la Vache qui rit, le 21 mai 2009 à Lons-le-Saunier. «La Maison de la vache qui rit» se trouve sur les vestiges de la fromagerie familiale de Lons-le-Saunier où Léon Bel inventa en 1921 le fromage fondu en triangle. Photo Jeff Pachoud / AFP

Les paysans et les drones

Tout le monde est coupable dans cette crise : l’Etat qui a pratiqué la politique de l’autruche, les industriels et les distributeurs qui ont pris les paysans pour de vulgaires fournisseurs de commodités, le syndicat majoritaire obsédé par la concurrence, les agriculteurs aux filières mal organisées et aux comportements irresponsables. Il y a un maillon faible dans la crise actuelle dont on ne parle pas et qui explique la rentabilité faible de certains élevages : un endettement insupportable des fermes causé par des équipements inutilement coûteux, des pratiques agricoles onéreuses qui se justifiaient d’autant moins qu’aujourd’hui, on diminue l’usage des nitrates dans les parcelles et des médicaments dans les élevages. On a tant dépossédé les paysans de leurs savoirs qu’ils croient intelligent de piloter une ferme avec des drones. On voudrait tant que les éleveurs prennent des vacances qu’on leur vend de ruineux robots de traite dont ils pourraient se passer. On les pousse tant à produire qu’ils en accusent les distributeurs et les consommateurs fautifs de préférer le bio lorsqu’ils savent désormais qu’une part importante des maladies neurodégénératives sont liées aux pesticides. On a tellement méprisé la polyculture – pourtant la meilleure des assurances contre les aléas de la nature – que la spécialisation a été tenue comme la martingale d’un « progrès » largement illusoire.

Tout économiste sait que la loi de King impose de sortir les produits agricoles des pratiques habituelles des marchés. La PAC a été un outil qui a permis de résoudre bien des crises avant que le libéralisme la déshabille de ses outils structurels. Que des ministres et syndicats majoritaires aient accepté ce qui venait de Bruxelles comme la garantie de la prospérité agricole fait pleurer sur la cécité ou le cynisme dont ils font preuve. Ils ont sous les yeux l’exemple d’une viticulture à deux vitesses, qualitative d’un côté avec des terroirs restés modestes, à majorité paysanne, à forte valeur ajoutée et rentable, et celle quantitative, perfusée par Bruxelles, qui penser tenir la dragée haute aux marchés internationaux. C’est oublier qu’en faisant main basse sur l’Europe orientale, les Allemands se sont achetés une main d’œuvre bon marché. Et qu’en Espagne, les «huertas» andalouses ne vivent qu’en pratiquant des formes d’esclavage de main d’œuvre africaine. La fascination pour une économie rentière a masqué tout un pan d’une agriculture de qualité, où des vaches non écornées et aux pis non atrophiés sont au pâturage et non pas dans leurs déjections comme dans la ferme des mille vaches, les porcs et les volailles non pas entassés dans des élevages monstrueux ni traités préventivement aux antibiotiques. La maltraitance animale a aveuglé les entrepreneurs âpres aux gains qui se sont fait rouler dans la farine de la grande distribution.

Stéphane Le Foll, passez aux actes !

Comment la pensée unique d’un syndicat majoritaire a-t-elle pu faire illusion ? Seule région de France à ne pas posséder de fromage de terroir, la Bretagne s’est perçue après la guerre comme une région modèle qui allait mener la France au productivisme. Accouplée à la grande distribution par le biais de coopératives cachant habilement leur pensée hypercapitaliste, l’agriculture locale s’est fourvoyée dans des productions dont la faible qualité était masquée par les volumes. Que n’a-t-on vanté cette « avance » comme on vante aujourd’hui celle d’une Allemagne pourtant au bord d’une catastrophe environnementale ! Parviendra-t-on à sortir des griffes des marchés de masse pour se caler dans les marchés appelés, avec mépris, de niche ?

Les consommateurs n’attendent que des élevages de qualité. Leur attachement au monde paysan se fera par des consommations locales. L’Etat peut redevenir crédible : si Stéphane Le Foll répète que les fermes industrielles n’ont pas d’avenir en France, qu’il passe aux actes ! Jamais les producteurs de lait ne rivaliseront avec les fermes néozélandaises où les moutons paissent dans une herbe abondante toute l’année. Jamais les producteurs de viande n’atteindront les prix de revient des Argentins et des Américains aux pratiques plus extensives. Jamais les producteurs de porcs ne rivaliseront sans l’aide d’une charcuterie de qualité.

La vache de Léon Bel joue la provocatrice pour réveiller une France de l’Ouest au pied du mur. Elle ne se moque pas des éleveurs, mais elle les enjoint de changer de modèle. Celui qu’une autre France a porté jusqu’alors dans la moquerie. Les géographes ne sauraient conseiller à tous ceux qui pensent que, dans une économie capitaliste, le marketing est tout puissant et que l’offre est toujours située avant la demande. Dans sa magistrale et inégalable Histoire de la vigne et du vin en France des origines au XIXe siècle, Roger Dion a montré que les grands vins de qualité ne sont pas liés à la qualité des sols ni à des cépages miraculeux. Ce sont les consommateurs riches et puissants qui initient la qualité. Aujourd’hui, la leçon n’est toujours pas entendue, les illusions persistent. On feint de croire que le marché pourra régler les crises et on cherche les coupables chez les distributeurs. Mais les agriculteurs qui ont signé des contrats avec ceux qui les pendent au bout de leurs cordes sont pleinement responsables de leurs engagements mortifères.

C’est la vache de Léon Bel qui vous le dit.

Gilles Fumey

Régionales : Bartolone met sa campagne sur les rails

Jeudi, 23 heures passées. Libéré de ses fonctions de président de l’Assemblée, en vacances depuis le jour même, Claude Bartolone, la tête de liste PS pour les régionales en Ile-de-France, nous a donné rendez-vous dans le métro parisien avec les maires des XIIe et Xarrondissement, pour une visite axée autour de la sécurité. «Tout le monde a une carte Navigo ?» s’enquiert un agent de la RATP. «Non», répond le groupe. Qu’à cela ne tienne, aujourd’hui, le cortège pourra passer à l’œil.

Avec ce déplacement, Bartolone lance sa campagne sur la question majeure des transports en commun. Cette visite sur le terrain peut aussi lui servir à rattraper sa bourde au micro de France Info début juillet, quand il avait malencontreusement confondu la station Auber, dans le quartier d’Opéra, avec celle d’Aubervilliers, en Seine-Saint-Denis — département dont il est pourtant élu depuis des années et dont il a même présidé le conseil général.

Assis sur les tables

Alors ce soir, pas de faux pas. «J’ai appris mon dossier par cœur !» claironne le candidat une fois arrivé dans les salles du PC sécurité de la RATP. Au-dessus de sa tête, une carte du réseau projetée sur un écran géant se constelle périodiquement d’étoiles rouges, signalant les incidents. A côté, sur les dizaines d’écrans de surveillance des caméras de sécurité, les voyageurs s’affairent. Un couple s’embrasse sur un quai de la gare du Nord, une jeune femme en slim rouge fume une cigarette en regardant sa montre à Barbès, sans savoir qu’une trentaine d’élus, d’agents de sécurité et de journalistes les observent. Oscillant entre fermeté — «il faut en finir avec cette mode bon-chic-bon-genre de la fraude» — et réalisme — «impossible d’autoriser les agents de la RATP à contrôler l’identité des contrevenants, ça ne passera jamais devant le Conseil constitutionnel» —, Claude Bartolone tâte le terrain.

En campagne, le président de l’Assemblée nationale, loin de son image au perchoir du Palais Bourbon, s’assoit sur les tables, demande à ses interlocuteurs de lui parler «franchement», écoute les réponses comme un élève studieux. «Si vous aviez une baguette magique, là, tout de suite, que feriez-vous pour améliorer la sécurité dans les transports ?» lance le candidat au responsable de la sécurité de la RATP. S’en suit une longue conversation où sont abordés, pêle-mêle, le besoin de plus de caméras, le problème des fraudeurs et les dégradations commises sur les bus en grande banlieue.

«C’est bon, on est dans le train»

En revanche, aucune question sur les solutions à court ou moyen terme pour les usagères du métro malgré le très médiatique plan national de lutte contre le harcèlement et les violences sexuelles dans les transports en commun, annoncé il y a quelques semaines par le gouvernement. Interrogé sur cette omission dans les couloirs de la maison de verre de la RATP, le candidat se vexe : «Je ne suis pas là pour faire dans le slogan. C’est un problème qu’il faut traiter à part.» Il concède brièvement qu’il est «pour» un arrêt à la demande dans les bus de nuit, et pourquoi pas la création d’une nouvelle entité à la RATP. «Mais rien de concret pour l’instant», car c’est un problème «très sérieux» et qu’il ne peut pas demander aux agents de sécurité «d’inventer la poudre». Tweet immédiat du chargé de com : «Je veux que TOUTES et tous vous puissiez utiliser les #transports en commun en vous sentant en #sécurité, peu importe l’heure. #RATP» 

Je veux que TOUTES et tous vous puissiez utiliser les #transports en commun en vous sentant en #sécurité, peu importe l’heure. #RATP

— Claude Bartolone (@claudebartolone) 23 Juillet 2015

Pas le temps d’épiloguer, il faut maintenant passer à l’étape suivante du déplacement : prendre le métro jusqu’à Nation. Depuis la Gare de Lyon, il n’y aura que deux stations, mais l’expérience n’en est pas moins spectaculaire. Pour franchir la barrière de sécurité, le président ne passera pas par le grand portique que nous ouvre le directeur de la sécurité de la RATP. Il préfère passer seul et utiliser le pass Navigo qu’on lui a confié. Au moment de rentrer dans la rame, même cirque : les photographes et caméras se pressent pour immortaliser le moment où le président de l’Assemblée nationale franchira la marche entre le quai et le train. Une fois à bord, un agent de sécurité parle dans son talkie-walkie «C’est bon, on est dans le train.» Les portes se ferment et le métro démarre. Regards interloqués des voyageurs nocturnes devant cette petite meute de costards-cravates et de journalistes dans une rame presque vide. «Tu vois qui c’est ?» demande une jeune rousse à son amie. Haussement d’épaules, rictus gêné.

Arrivés au terminus, alors qu’on présente au candidat l’action du Recueil social, ces volontaires de la RATP qui s’occupent chaque soir des SDF dans le métro, l’annonce de la fermeture imminente de la station résonne en plusieurs langues. Les derniers trains sont passés. Il est 1 h 20 du matin, et Claude Bartolone rentrera «inspiré» par ce premier repérage. La semaine prochaine, il reviendra, mais cette fois-ci, ce sera pour inspecter les travaux en cours sur les voies.

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